Les idées fausses sur le deuil
La méconnaissance du processus de deuil entraîne tout un cortège d’idées fausses et d’injonctions sociales irréalistes, qui sont toxiques et invalidantes pour les personnes endeuillées qui les reçoivent.
Nous vous présentons ici une sélection(1) de ces nombreux présupposés, avec en fin d’article, le rectificatif qui s’impose pour rappeler ce qu’est réellement le vécu du deuil, ses étapes, son intensité et sa durée…
« Il est malsain de répéter et de raconter ce qui est arrivé. »
« Il ne faut pas montrer ses émotions, c’est déplacé (surtout pour un homme !). »
« Il n’y a que les personnes fragiles ou psychologiquement faibles qui sont affectées par le deuil. Il faut “être fort” et serrer les dents sans se complaire dans sa souffrance ! Un peu de dignité que diable ! Le vécu du deuil est une question de personnalité et de force de caractère. »
« Trop parler de la personne décédée est néfaste et morbide. Il faut évacuer au plus vite son souvenir et passer à autre chose : la vie continue ! »
« Il est malsain d’avoir toutes ces photos au mur. »
« Il est morbide et malsain de garder ses pensées tournées vers le défunt. »
« Arrête ! Il est malsain de revenir sans cesse sur des souvenirs aussi douloureux. C’est se complaire dans son malheur, il faut se tourner vers l’avenir. »
« Il est préférable de faire son deuil seul, sans importuner ses proches avec ses soucis. Il faut les “respecter”. C’est une question de bonne éducation. »
« Les rituels de deuil sont des pratiques désuètes et complètement inutiles. »
« Les jeunes enfants ne comprennent rien à la mort. Autant ne rien leur dire. »
« La douleur va progressivement s’atténuer au fil du temps. Il n’y a rien à faire d’autre que d’attendre que ça passe. »
« Ne t’en fais pas, avec le temps, on finit par oublier. »
« Ton deuil va durer quelques mois, grand maximum un an, au-delà c’est pathologique ! »
« Il ne faut pas remuer le couteau dans la plaie. »
« Ne pas parler du défunt car cela faire de mal à la personne endeuillée »
« Il est mort (elle est morte), je n’ai pas le droit d’être heureux(se). »
Toutes les citations qui précèdent reposent sur des idées fausses, vous pouvez les mettre aux oubliettes !
Lisez et relisez les repères qui suivent, ils vous aideront à rétablir la vision juste de ce qu’est réellement le deuil :
- La répétition en boucle est saine, elle est nécessaire à l’intégration psychologique et émotionnelle de la perte de l’être aimé.
- Le deuil a un temps et des étapes incompressibles qui ne peuvent être contrôlées par la raison et la volonté.
- Aller au cimetière, mettre des photos au mur, etc. Ces rituels ont une véritable fonction thérapeutique. Cela fait partie des quatre tâches du travail de deuil.
- Le deuil peut durer des années.
- Le deuil est un processus essentiellement émotionnel, il est absolument essentiel d’exprimer ses émotions pour le bon déroulement du deuil, ce n’est aucunement faire preuve de faiblesse.
- Parler du défunt à la personne en deuil est très bénéfique pour elle, elle craint tant qu’on oublie l’être disparu. Se manifester aux dates anniversaires même des années après le décès est tout aussi salutaire.
- Il n’y a pas à faire bonne figure en société quand tout est dévasté en soi.
- Un deuil accompagné par des proches ou des bénévoles aidants se déroule de façon beaucoup plus harmonieuse
- Les enfants comprennent très bien le deuil, il est important de les intégrer aux rituels collectifs des funérailles, de leur expliquer ce qui se passe.
- Il y a un « travail » (conscient et volontaire) du deuil à entreprendre pour accompagner et soutenir le « processus » naturel de deuil
- On n’oublie pas l’être aimé quand le deuil est accompli. On est à jamais en lien avec lui.
(1) Cette liste est inspirée des idées fausses décrites par Christophe Fauré dans son ouvrage Vivre le deuil au jour le jour, éditions Albin Michel, nouvelle édition revue et corrigée 2018.
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Rahajaromisa
15 Oct, 2021 à 12h18