Aimer à nouveau
Cela vous semblait inimaginable, et pourtant, des mois, des années après avoir perdu l’être cher, vous vous sentez prêt(e) à commencer une nouvelle relation. Quels sont les écueils possibles ? Comment vivre au mieux ce nouveau chapitre personnel et familial de votre existence ?
Le départ de l’être aimé marque le début d’un nouveau chemin qui est unique pour chacun. Pour les uns, ce sera la voie d’un célibat durable, où ils pourront se consacrer pleinement aux enfants, à de nouveaux projets, à l’écoute de leurs vrais besoins, à une voie plus contemplative ou/et dédiée aux autres, à trouver l’apaisement jour après jour dans la relation intérieure avec l’être disparu…
Un à trois ans après le décès du conjoint
Pour d’autres, ce sera de répondre à l’appel de vivre de nouveau en couple car ils se sentent prêts à construire une nouvelle relation d’amour. L’expérience montre que c’est après un délai d’un à trois ans suivant le décès de leur conjoint que les veufs et les veuves envisagent la possibilité de s’engager dans une nouvelle relation. Cette décision mérite que l’on se donne du temps. Il est en effet conseillé, avant de franchir le pas, de considérer avec honnêteté ce qui anime la quête d’un nouveau partenaire.
Se poser les bonnes questions
S’agit-il d’étouffer l’insupportable douleur de la perte ou de vivre réellement la naissance d’un authentique amour ? Sur quels éléments se construit cette nouvelle relation ? Des points de ressemblance avec le conjoint disparu ? La présence de circonstances similaires à celles que l’on a partagées avec lui par le passé ? Est-ce pour réparer des fautes – parce que l’on se sent coupable – que l’on va se tourner vers un partenaire de santé fragile, qui nécessite des soins quotidiens ? Ou vers tel autre qui manifeste les mêmes comportements dysfonctionnels que l’être disparu ? À cette étape, il est important de se poser ces questions afin de s’assurer que l’on n’est pas dans un mouvement de fuite du vécu du deuil ou dans la peur de vivre la solitude.
Un avenir libre du passé
On ne peut faire l’économie de la traversée du deuil et de la douleur qui l’accompagne, vouloir l’escamoter en fuyant vers un autre partenaire c’est à coup sûr vivre des déconvenues. Il s’agit donc de ne pas se précipiter, de voir si l’on se sent vraiment prêt(e) pour un nouveau départ, c’est une simple et douce vigilance à avoir avec soi-même. Ceci étant posé, vous pouvez accueillir avec simplicité le désir d’une nouvelle relation d’amour. Il participe d’un mouvement naturel, qui répond au besoin d’aimer et d’être aimé. L’important est de l’inscrire dans un avenir neuf, libre du passé, condition sine qua non pour une relation durable et harmonieuse. Il y aura sans doute quelques tâtonnements lors des premières rencontres, ils participent au retour à la vie affective.
Aimer sans culpabilité
Ce n’est pas trahir ni oublier l’être disparu que de s’autoriser à vivre cela. Vous pouvez avoir le sentiment que cette nouvelle relation intervient de façon trop rapide, ou ressentir de la culpabilité parce vous avez l’impression d’être infidèle à l’être disparu. Vis-à-vis d’autrui, vous pouvez craindre d’être mal jugé(e), pour autant un court temps de veuvage ne préjuge en rien de l’intensité de votre ancien amour. Vous pourriez également ne pas vous autoriser à être de nouveau heureux(se). Or c’est le flux de la vie-même qui vous pousse vers un nouvel avenir, c’est un processus tout-à-fait naturel de progressivement vous détacher du couple que vous formiez autrefois, pour entrer dans une nouvelle vie à deux. Cela ne remet pas en cause l’amour que vous partagiez avec l’être cher.
Un couple unique au passé et au présent
Le couple que vous formiez était unique comme le sera celui que vous créez. L’amour que vous ressentez pour votre nouveau partenaire est tout aussi sincère et véritable. Vous allez sans doute osciller pendant une période plus ou moins longue entre le présent et le passé. Cela peut prendre du temps d’accueillir la nouvelle personne telle qu’elle est sans la comparer avec l’être disparu.
Ne pas idéaliser l’être disparu
L’idéalisation de votre ancien(ne) compagnon(compagne) peut être un obstacle. Face à un(e) ancien(ne) partenaire parfait(e), le nouveau conjoint pourrait avoir des difficultés à trouver sa place. Une certaine vigilance sera donc nécessaire dans votre façon de communiquer avec lui(elle). Il s’agira d’exprimer librement les souvenirs et l’amour que vous ressentiez pour votre ancien conjoint(e) sans blesser la nouvelle personne. C’est un équilibre à trouver : ne pas vous censurer, ne pas trop envahir.
Qu’en pensent les enfants ?
Un autre équilibre délicat à mettre en place concerne les relations avec les enfants face au nouveau partenaire et au changement de situation familiale que cela induit. La réaction des enfants est souvent mitigée : ils se réjouissent que leur parent puisse de nouveau être heureux mais ils regardent avec suspicion la nouvelle personne qui entre dans leur foyer. Ils peuvent craindre d’être moins aimés, de perdre le lien qu’ils avaient tissés entre eux. Les plus jeunes sont souvent soulagés car le nouveau partenaire pourra se substituer au rôle du parent disparu. Pour les enfants plus grands, cela peut très bien se passer comme au contraire être conflictuel.
Beaucoup de diplomatie et de respect
Certains adolescents peuvent se révolter, s’emporter avec violence contre ce qu’ils vivent comme une trahison vis-à-vis du parent disparu. Ils pourront avoir des difficultés à considérer de manière objective les qualités et les défauts du nouveau partenaire. À leurs yeux, celui-ci ne pourra jamais égaler l’être perdu qu’ils idéalisent. Dans ce cas, il faudra beaucoup de temps, de diplomatie et de respect pour que, progressivement, les enfants s’ouvrent et acceptent la nouvelle personne. Il faudra donc être ferme (il s’agit de votre future vie de couple) et dans un dialogue constant avec eux.
Dialoguer avec chaque enfant
Leur dire que bien sûr le nouveau partenaire ne remplacera jamais le parent disparu, cela est impossible. En parler dans des entretiens en tête avec chacun des enfants sera très bénéfique : ils pourront exprimer leurs peurs, leurs émotions. Ils seront rassurés, par le temps que vous leur consacrez, de la constance de votre amour pour eux. Avec beaucoup de patience, les relations conflictuelles finiront par s’apaiser, et le nouveau partenaire sera intégré à part entière dans la famille.
Que faire si le conflit persiste ?
Si la situation devenait vraiment intenable, vous pourriez conseiller à votre enfant d’aller consulter un thérapeute auprès de qui il pourra se confier. Cela pourra l’aider à traverser cette période difficile. Une thérapie familiale peut également être une bonne solution. N’hésitez pas à vous rapprocher de votre médecin, il pourra vous conseiller des thérapeutes.
Vous êtes acteur de votre présent et de votre futur avec un(e) nouveau(elle) conjoint(e). Vous trouverez les solutions qui apaiseront votre chemin et celui de votre famille. La cicatrisation qui est en cours pour le deuil que vous continuez de traverser est une force vive qui vous soutient. Elle continue d’œuvrer dans la profondeur de votre subconscient.
La construction de liens d’amour
Comme vous le voyez, vivre le deuil et être amoureux ne sont pas antinomiques. Le processus du deuil coexiste parfaitement avec la construction d’un nouveau lien d’amour. Vous allez continuer le travail de deuil, construire un lien intérieur avec l’être disparu, tout en créant une nouvelle relation, les deux mouvements se déroulent simultanément à des niveaux différents de votre être. Ils vous conduisent vers une nouvelle vie où l’amour a sa place.
Catherine
01 Nov, 2022 à 22h39